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De la F1 à nos rues : Renault passe à l’hybride

Bien que les Formule 1 soient obligatoirement hybrides depuis des années, Renault commence juste à déployer cette technologie sur ses modèles de grande série. Alors, quelles leçons le constructeur français a-t-il tirées de son expérience de motoriste en F1 pour faire entrer l’hybride dans une Clio ?

De la F1 à nos rues : Renault passe à l’hybride

La Formule 1 et une simple Clio ont peut-être plus de points communs que l’on peut croire. Et en premier lieu, un moteur. Ou plutôt plusieurs : car les F1 comme le petit best-seller français sont toutes deux hybrides essence-électrique. Une histoire qui dure depuis un moment pour la voiture de course, avec une réglementation qui a imposé l’électrification il y a déjà des années.

Un changement de règlement en 2014 a imposé un débit d’essence limité à 100 kg/h et il a bien fallu que les constructeurs s’adaptent et augmentent les rendements de leurs moteurs pour consommer moins. Les dirigeants du championnat le plus prestigieux du sport automobile ont en effet choisi de limiter les coûts, d’imposer des technologies plus « vertes » avec des contraintes fortes pour forcer les motoristes à drastiquement limiter la consommation. "En cela, le règlement rejoint des problématiques de la rue", nous explique Nicolas Espesson, ingénieur Renault F1 Team, en charge de l’optimisation moteur.

Au centre, Nicolas Espesson, ingénieur Renault F1 Team, en charge de l’optimisation moteur.
Au centre, Nicolas Espesson, ingénieur Renault F1 Team, en charge de l’optimisation moteur.

Pour les modèles de série, les réglementations européennes en termes d’émissions de CO2 (et donc, de consommation, c’est directement lié) sont de plus en plus strictes avec une moyenne de 95 g de CO2/km pour 2021 demandée aux constructeurs. Dans le même temps, le malus écologique français devient lui aussi de plus en plus dur, avec des pénalités à partir de 138 g/km de CO2 selon la norme WLTP, depuis le mois de mars 2020.

Renault, précurseur dans le domaine de l’électrique mais en retard sur l’hybridation, se voit donc bien obligé d’y passer pour baisser les émissions de ses gammes. Le constructeur lance ainsi cette année ses modèles hybrides (Clio) et hybrides rechargeables (Captur, Mégane) E-Tech. La Clio E-Tech hybride, qui ne peut se brancher pour recharger sa petite batterie, est celle dont le fonctionnement est le plus comparable à la F1. Elle réussit à atteindre jusqu’à 80 % du temps de roulage en ville en tout électrique et y obtenir un gain de consommation pouvant aller jusqu’à 40 % par rapport à un moteur thermique. Les critères d’usage sont évidemment différents de ceux de la F1 mais, à sa manière, la Clio obtient ici elle aussi d’excellentes performances.

60 personnes accompagnent le team à chaque course.
60 personnes accompagnent le team à chaque course.

Des milliards de données à chaque course

Les équipes de R&D des teams de Formule 1, parmi les meilleures du monde, sont capables de tous les exploits. "Si demain on nous dit de faire une voiture qui vole, on saurait tous faire", s’amuse à nous dire Cyril Abiteboul, Directeur Général de Renault Sport Racing.

Il faut dire qu’avec les formidables moyens d’analyse atteints aujourd’hui, absolument tout le fonctionnement de l’auto est surveillé en temps réel : une F1 comporte 200 capteurs qui remontent… 50 milliards de données par course et par voiture. GPS, télémétrie, position du volant, des pédales, des roues et, bien sûr, fonctionnement en profondeur du moteur… En tout, 2 000 paramètres dont certains sont analysés 10 000 fois/seconde, le tout étant croisé dans un système de big data dédié.

Ainsi, la gestion moteur peut-elle exploiter les régimes optimums pour recharger la batterie en prévision d’un coup de boost électrique pour un dépassement, une logique reprise de manière semblable dans la Clio hybride, même si celle-ci utilise bien entendu infiniment moins de données et de critères. Impossible de pointer le doigt sur l’influence technique précise entre F1 et moteur de grande série (évidemment, aucune pièce commune) mais une chose est sûre, la connaissance la gestion de l’hybridation sous les contraintes de la compétition permet d’en maîtriser d’autant mieux les rouages pour les appliquer en production.

Consommation = performance

La gestion de chaque millilitre d’essence compte en course.
La gestion de chaque millilitre d’essence compte en course.

Avec une quantité d’essence et un débit limités, en F1, l’équation est simple : il faut être le plus sobre possible, sachant que 1 kg de plus correspond à quatre centièmes de secondes par tour, soit la différence entre 2 pilotes en qualifications. Les consommations sont donc calculées au millimètre et à l’arrivée, les réservoirs sont à un niveau qui ferait atteindre des crises d’angoisse à l’automobiliste lambda !

Les moteurs développent environ 1 000 ch, avec un petit moteur turbo assisté de deux moteurs électriques : un sur le turbo pour pousser son régime et un sur le vilebrequin pour accélérer et freiner comme sur une hybride routière classique. La moitié du freinage se fait grâce à la récupération d’énergie électrique, ce qui implique une gestion ultra-fine du système, sachant qu’un seul freinage peut remplir la batterie de 1,2 kW/h, une capacité équivalent à celle d’une Clio hybride.

De son côté, le petit modèle best-seller de Renault, en version hybride, se contente d’une consommation normalisée WLTP de 4,3 l/100 km et de 98 g/km de CO2, pour une puissance de 140 ch. Sa régénération au freinage, son assistance électrique pour les relances fonctionnent selon des principes proches, à une autre échelle bien sûr.

Schéma technique de la nouvelle Renault Clio E-Tech.
Schéma technique de la nouvelle Renault Clio E-Tech.

Bilan : un coup de pouce technologique et marketing

Les équipes moteur du Renault F1 Team nous l’assurent, ils échangent régulièrement avec leurs collègues qui travaillent sur les modèles de grande série (et les passerelles existent d’ailleurs pour les ingénieurs qui peuvent passer de l’un à l’autre).Chez Honda, on explique que la motorisation hybride de la toute nouvelle Jazz a elle aussi à tenir de l’expérience en F1 du motoriste japonais.

Une communication que les constructeurs poussent volontiers, alors que l’effet catalyseur de la compétition sur les technologies de série est souvent indirect, mais bénéfique. Surtout, depuis que les contraintes de consommation touchent la compétition, la dynamique d’ingénierie trouve plus de points communs avec la série. Des liens qui devraient se resserrer à l’avenir avec des contraintes de coûts, techniques et concernant les carburants (part renouvelable en hausse) plus strictes en F1, à partir de 2022. En quelque sorte, une volonté de rapprocher les contraintes de la compétition de celles de la route.

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