DESIGN by BELLU : la fée électricité
Le design change. Enfin ! Les designers sont en train de découvrir que les nouvelles technologies pouvaient stimuler leur créativité
Il leur a fallu du temps aux designers pour réagir. Pour profiter de l’opportunité qui leur était donnée par le développement des motorisations électriques et électrifiées, pour se remettre en question, pour remettre en cause les architectures établies depuis des lustres. Longtemps, ils ont casé les moteurs électriques et les batteries à l’intérieur des mêmes espaces que dans les voitures à motorisations thermiques.
Il ne fallait pas que ça se voit quand une 208 ou une Golf renonçait au sacro-saint moteur à essence pour recourir à l’énergie électrique. Elles avaient l’excuse d’utiliser des bases existantes, par économie. Mais même quand ils partaient d’une page blanche, les stylistes gardaient les mêmes réflexes, ressassaient les mêmes formes et reproduisaient les mêmes proportions. La Renault Zoe ou la Nissan Leaf conservaient des silhouettes semblables à celles qu’elles auraient eues en conservant une motorisation conventionnelle.
Caricaturale à cet égard, souvenons de la Fisker Karma, sublime grande routière hybride qui affichait des lignes aux valeurs ancestrales pour le plus grand plaisir des yeux. Son capot était si long qu’il suggérait la présence d’un douze-cylindres… alors qu’il n’abritait qu’un minable quatre-cylindres de secours.
Quand BMW créa le département « i », la firme assuma avec brio une démarche très engagée en matière de style : la petite i3 et la sportive i8 exprimaient clairement par leur traitement stylistique la modernité de leur technologie. C’était avant. Aujourd’hui, le design de BMW est rentré dans le rang et se garde bien de souligner l’électrification de certains de ses modèles. La iX comme la iX3 sont perdues dans la masse des SUV, dans l’anonymat et la banalité. Même la berline BMW i4, certes élégante, se contente d’un vocabulaire conformiste et ne se démarque des séries classiques.
Retour en arrière. Autrefois, les pionniers des énergies propres usaient volontiers de l’excès et de la parodie. En 1991, General Motors eu le mérite de vouloir commercialiser une voiture électrique. Mais les choix du créneau et du style se sont avérés incongrus. Avec sa silhouette incongrue de berlinette conçue pour les 24 Heures du Mans, le coupé EV-1 s’est marginalisé d’emblée. Forcément, il ne rencontra qu’un succès d’estime en ne convainquant que 1 117 originaux.
Rappelons nous aussi des premières Toyota Prius à motorisation hybride (en 1997) ou de la Honda FCX Clarity première voiture dotée d’une pile à combustible produite en série (en 2008). Elles étaient si laides, si vilaines, que l’on avait vraiment le sentiment qu’en choisissant une technologie propre il fallait affichait sa détestation de l’automobile, refuser toute séduction, rejeter tous les attributs d’un esthétisme gratuit.
Comme si ces énergies de substitution devaient s’accompagner d’un rejet affiché de l’automobile, d’un refus de tout désir et de tout plaisir pour clamer sa bonne conscience.
Les temps ont changé. Aujourd’hui, on voit fleurir des voitures établies sur des plates-formes spécialement dédiées aux motorisations électriques, autorisant des architectures innovantes et libérant la créativité des designers qui se jouent de la distribution des composants mécaniques - moteurs, batteries - propres aux voitures électriques. Le style accompagne la révolution technologique, à l’image de la Volkswagen ID.3 qui du jour au lendemain infligea un coup de vieux à la Golf, à l’instar aussi des Mercedes-EQE et EQS radicalement transgressives par rapport aux historiques Classes E et S.
Mêmes les sacro-saints SUV sortent de leurs codes. La Nissan Arya ou la Cadillac Lyriq renouvellent le genre ; elles ont le mérite d’être passées de la case concept car à la commercialisation sans être dénaturés. Un progrès sensible quand on se souvient des déceptions si souvent enregistrées en découvrant les « vrais » produits après avoir été alléchés par des projets prometteurs.
Le groupe coréen nous a habitué à de semblables surprises. Les remarquables Hyundai Ioniq 5 ou Kia EV6 sont descendues dans la rue sans perdre leur fraîcheur et leur avant-gardisme. Les berlines grandes routières qui étaient tombées en désuétude sont peu à peu réhabilitées, peut-être avec en filigrane l’influence de start-up comme Lucid.
Une chose est acquise : l’appétence pour l’automobile racée, élégante et efficiente est garantie avec des coups d’éclat comme l’Audi e-Tron GT ou la Porsche Taycan.
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