La beauté des laides - Le Peugeot 1007 : malgré, ou à cause de ses portières coulissantes, il n'a jamais été en tête des ventes
Un minispace est, par principe, une auto conçue pour les petites familles pas trop dépensières. Mais en 2005, Peugeot a procédé à l'inverse, en s'imaginant qu'un tel engin pouvait séduire un public adepte de petits monospaces lourds, à trois portes, au design difficile et au prix élevé. Récit d'une tentative ratée devenue une affaire réussie pour les amoureux d'occasions pas chères.
Ils ont laissé peu de traces dans l'histoire de l'automobile. Mais les minispaces ont tout de même réussi à imprimer une désagréable persistance rétinienne dans l'œil de tous ceux qui les ont vus passer entre 2003 et 2010, à l'époque de leur apogée. Avec le recul, aucun d'entre eux n'a laissé de bons souvenirs, ni visuels, ni en matière de plaisir de conduite. Mais les constructeurs sont ainsi : dès que l'un des leurs se précipite sur un nouveau concept, les autres suivent, et parfois, de manière très hasardeuse. C'est ainsi qu'en 2003, Opel, que l'on n'attendait vraiment pas sur le terrain de l'innovation, présente le Meriva. L'idée est très simple : refaire le coup du monospace, le gros succès du moment, sur une base de citadine qui est, tout de même, l'un des segments les plus vendus en Europe. Une si bonne idée que l'on peut se demander pourquoi personne n'y avait pensé avant l'Allemand. Conçu sur la plateforme de la Corsa, le Meriva impressionne et cartonne. Très vite, parmi les marques concurrentes, c'est la déferlante. En 2004, Renault dévoile le Modus, suivi de près par le Fiat Idea et son clone Lancia Musa.
Chez PSA, on est un tantinet en retard sur les copains. Alors il faut trouver la bonne idée : celle qui va permettre de se démarquer dans cet océan de mini-cubes ou les marques asiatiques sont aussi très présentes. En 2005, déjà 12 minispaces sont sur les rangs. Alors Peugeot dégaine sa botte secrète : la porte coulissante électrique. Le système a fait ses preuves depuis 10 ans sur le gros monospace 806 partagé avec Citroën, Fiat et Lancia. Il est même possible d'électrifier les fermetures et ouvertures et le tout est globalement fiable. Banco. Bon, évidemment, pour caser une telle quincaillerie, pas question de fabriquer un engin à cinq portes. Trois suffiront bien. Le design est gelé et l'affaire est validée d'autant plus rapidement que le lion a dans ses cartons un concept que son vieux complice Pininfarina avait concocté il y a trois ans pour le Mondial de Paris de 2002. Baptisé Sésame, il devait préfigurer les "nouvelles mobilités urbaines". Après une rapide étude de fiabilité, les cadres de l'avenue de la Grande Armée décident de foncer.
Un style encombrant et un poids conséquent
Avant de lancer l'auto, il faut lui trouver un nom. 107 est déjà pris, 207 aussi, 007 également. Peugeot a bien essayé de négocier avec James Bond, mais en vain. Et si on mixait tout ça ? Va pour 1007. Un truc qui se décline facilement en 2008, 3008 et on connaît la suite. En mars 2005, l'engin apparaît et il est commercialisé dans la foulée. la presse est circonspecte. Une célèbre émission automobile fait la moue. Dans son essai, son présentateur tente de faire le plein de la 1007 porte coulissante ouverte : elle obstrue l'entrée du réservoir. C'est un détail comparé aux autres soucis. Le design de l'engin est plombé par les fameuses portes qu'il faut caser dans un encombrement forcément réduit, puisque le 1007 est un peu plus court que la citadine 206. Quant au rail chromé qui permet de guider ces fameuses portes, on ne voit que lui. L'ensemble cubique tente le coup de la custode inversée, un tube à l'époque. Pour l'homogénéité, on repassera.
Le style est lourd ? l'auto aussi. En version diesel HDI, le carburant à la mode de l'époque, elle dépasse les 1 300 kg. Un surpoids évidemment lié à la quincaillerie nécessaire pour l'ouverture des fameuses portières qui rajoute 100 kg au poids initial. Du coup, les moteurs d'entrée de gamme (70 et 75ch) sont à la ramasse. Résultat : pour une motorisation 110ch essence ou diesel, susceptible d'arracher l'engin dans de bonnes conditions, l'addition est aussi lourde que le 1007 : près de 17 000 euros à l'époque. Et la consommation est, elle aussi, plutôt alourdie.
L'auto des seniors
En plus, la configuration exclusivement en trois portes fait fuir les familles adeptes de minispaces. Peugeot se rend compte rapidement que ses seuls clients sont plutôt âgés, attirés par la facilité d'accès et qu'ils ne sont plus en charge d'une progéniture qui a bien grandi. Un marché qui non seulement n'est pas extensible, mais qui en plus donne à l'auto une image qui manque un poil de dynamisme. Alors, après 4 ans de bons et loyaux, mais limités, services, le 1007 est arrêté, sans même que ses géniteurs songent un instant à lui donner une descendance.
Faut-il pour autant jeter le 1007 avec l'eau de ses multiples défauts ? Certainement pas, car il est aussi bourré de qualités. Au moment de sa commercialisation, il était l'un des premiers à disposer d'un intérieur aussi personnalisable que coloré, et qui, promettait l'argumentaire des vendeurs, "pouvait être installé en un quart d'heure". Évidemment, une bonne décennie plus tard, il n'est pas certain que l'engin qu'on aura acquis d'occasion, puisse être transformé ainsi. Sauf à disposer d'un garagiste qui ne jette rien.
Le flop est devenu une bonne affaire
Mais sans être senior, on peut aussi avoir envie de confort, d'accès facile à bord et d'une boîte auto avec des palettes au volant. Car bien avant que les DSG, PDK, DCE et autres Steptronic deviennent aussi courantes que des essuie-glaces dans une auto digne de ce nom, le minispace Peugeot en était déjà équipé. Et que dire de l'ouverture des portières avec une simple télécommande ? Aujourd’hui on s'extasie lorsqu'une marque allemande permet de débloquer une auto avec un smartphone lourd et cher. Mais il y a quinze ans, une petite clé permettait de faire mieux que ça. En plus, un 1007 d'occasion se dégotte pour trois fois rien. Et en bon état en plus, puisque ce type d'engin a souvent été dorloté et n'a jamais été essoré par des jeunes conducteurs adeptes de trajectoires au cordeau et de freinages tardifs. Les déplacements urbains et périurbains sont ses royaumes. Et au pays des cocons destinés à se rendre le plus simplement possible d'un point A à un point B, son nouveau propriétaire sera ravi de se garer serré entre deux SUV qui ne pourront même pas ouvrir leurs portières classiques. Alors qu'il pourra se faufiler grâce à ses accès coulissants.
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