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Mobilités de demain : la majorité du territoire français encore mal barrée

Les défis environnementaux et la transformation des modes de vie vont bien finir aussi, comme à la ville, par impacter les mobilités à la campagne. Un rapport parlementaire fait le point sur ces enjeux, et montre que les solutions à envisager restent à généraliser. Dans un contexte où les moyens manquent, la voiture devrait continuer d'y jouer un rôle central. Reste tout de même à faire évoluer son utilisation…

Mobilités de demain : la majorité du territoire français encore mal barrée

Quelles mobilités dans les espaces peu denses, où habitent un tiers des habitants de notre pays ? Si dans les grandes villes, la question est en partie réglée - terminé le tout bagnole, les politiques privilégient désormais les mobilités dites douces et décarbonées -, c'est loin d'être gagné dès que l'on s'en éloigne. « Et nul besoin d'aller bien loin pour le constater ! », note Olivier Jacquin, le rapporteur d’un récent rapport sénatorial sur le sujet, puisque « ces espaces peu denses représentent 90 % du territoire français ».

Pour certains d’ailleurs, la définition même de ces zones repose sur cette dépendance : c’est là où l’on ne se déplace qu’en voiture, faute d’alternatives, après des décennies de recul des transports collectifs. Les mobilités du quotidien y sont ainsi assurées quasi exclusivement en véhicule individuel, et vu le coût du ferroviaire, il paraît peu probable de le voir revenir en force.

Or, d’ici à 2040, l’année qui doit sonner la fin de la commercialisation des moteurs thermiques en France, « il va bien falloir faire face à ce défi dans ces contrées aussi », relève le sénateur PS, interrogé par Caradisiac. « Le modèle va donc nécessairement être appelé à se transformer ». Et à l’entendre, comme à lire le rapport d’information du Sénat publié en début d’année, il n’y aura pas des tas de solutions, vu le budget aussi qui pourra y être consacré. Même si ce n’est pas le cas de la majorité de ces territoires, il y en a où l’argent manque vraiment.

L'empire de la voiture difficile à remettre en question

« Il faut être pragmatique », rétorque ainsi le sénateur Jacquin à ceux qui ne voudraient même plus en entendre parler : « La grosse préconisation de notre rapport d’information, c’est la sociabilisation de la voiture, notamment pour répondre à ce que l’on appelle "les assignés territoriaux" ». Par-là, il entend les 15 à 20 % de cette population qui vit dans « ces espaces peu denses » où la seule solution pour se déplacer, c’est donc de le faire en voiture, mais qui pourtant n’en possède pas et qui se retrouve donc complètement isolée. Cela peut être des jeunes, des femmes, des personnes âgées, handicapées, des précaires qui n’ont tout simplement pas les moyens ni le permis de conduire… D’où cette idée d’utiliser la voiture autrement et de la voir surtout partagée.

L'autopartage, ainsi que le covoiturage représentent apparemment les solutions les plus réalistes, mais aussi les moins coûteuses pour répondre à ces défis futurs. Le numérique devrait y jouer un rôle fondamental pour leur organisation. Les collectivités et les entreprises pourraient être par exemple amenées à mutualiser leurs flottes les soirs et les week-ends, pour permettre leur utilisation en dehors des horaires de travail, plutôt que de les laisser immobiliser et garer sur un parking. Olivier Jacquin croît beaucoup, semble-t-il aussi, à l’organisation de « lignes virtuelles de covoiturage de courte distance », comme celles développées par Ecov – un service déjà présent notamment dans les alentours de Lyon, Grenoble et Rennes -, « surtout si l’existence d’une voie dédiée et l’indemnisation du conducteur y sont associées ».

Marche et vélo aussi au programme

Comme en villes, il faudra certainement en passer par un changement des mentalités et des habitudes. La palette des solutions alternatives à la voiture individuelle comprend aussi le vélo, la marche et l’ensemble des « engins de déplacements personnels » (trottinettes, électriques, monoroues…). Car dans ces « espaces peu denses », une partie des déplacements feraient aussi moins de 5 kilomètres. Selon l’enquête nationale mobilité et modes de vie 2020 du Forum Vies Mobiles, « 36 % des gens parcourent moins de 10 kilomètres par jour pour leur travail », quand « près d’un quart (22 %) parcourt plus de 60 kilomètres par jour en moyenne » quand même !

Qui sait : l’évolution de cette dernière année, avec le développement de ce que l’on pourrait appeler la « démobilité » avec laquelle ce qui compte, comme le définit le rapport parlementaire, est « moins le fait de se déplacer que d’avoir accès au service, sous une forme éventuellement dématérialisée », va peut-être s’inscrire dans la durée ? Les confinements de 2020, la situation qui a perduré en ce début 2021, l’accroissement du télétravail, pourraient en effet laisser des traces… Certains actifs, on le sait, ont préféré en profiter pour venir s’installer à la campagne. Un tel mouvement, peu mesurable pour le moment, pourrait donc impacter plus ou moins fortement les mobilités.

Le précédent rapport du Sénat sur le sujet, rendu fin 2018, « pointait le risque d’un progrès à deux vitesses (…)  avec d’un côté des zones denses bien maillées, bien desservies et bien connectées, (…) délaissant peu à peu le véhicule individuel pour des modes de transport partagés, plus vertueux (…), et d’un autre côté les zones rurales ou les petites villes, condamnées à faire reposer les mobilités de leurs habitants presque uniquement sur la voiture ». Près de trois ans plus tard, s’il y a sans doute eu une prise de conscience entre-temps, en pratique, il n’y a quand même pas eu de grands changements.

Et apparemment, ce qui attend les campagnes n'est pas complètement différent de ce qui a commencé à se développer en villes, à ceci près que la voiture pourrait continuer à y jouer un rôle central quand elle peut devenir complètement secondaire, là où les transports collectifs prennent le relais. Reste à la faire évoluer… Comme déjà évoqué, la politique fixée en matière de décarbonation va bien finir par bouleverser aussi les mobilités hors agglomérations. Laisser ces territoires, ou en tout cas une bonne partie d’entre eux, en dehors de ce mouvement, risque de faire rater l’objectif environnemental, tout en pénalisant leurs habitants.

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