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Renault 25 V6/V6 Turbo (1985-1992) : roulez mitterrandien, à partir de 2 000 €

Dans Rétro / News rétro

Stéphane Schlesinger

Dernière grande berline française à succès, la R25 bénéficie de versions haut de gamme puissantes, suréquipées et totalement sous-cotées. À saisir maintenant !

Renault 25 V6/V6 Turbo (1985-1992) : roulez mitterrandien, à partir de 2 000 €

Si son image est fortement liée au pouvoir socialiste, la Renault 25 voit pourtant sa genèse débuter sous Giscard, en 1977. Gaston Juchet, designer émérite de la Régie, griffonne une voiture dotée d’une bulle arrière, ce qui plaît à son directeur, Robert Opron, transfuge de chez Citroën. Pourtant, le style du projet X29, qui débouchera sur la R25, arrive à maturité bien lentement, la direction de Renault tergiversant quant à l’orientation à lui donner. S’il paraît très homogène sur le modèle final, il est en fait le résultat d’un compromis long à obtenir. Les mêmes hésitations marquent aussi l’élaboration du tableau de bord, fruit du cerveau de Marcello Gandini, auteur notamment de la Lamborghini Countach et de la Citroën BX, et imposé à la dernière minute par Robert Opron.

Techniquement, le processus est plus simple : on récupère la plate-forme, les suspensions et les mécaniques des R20/R30, on les améliore et hop, le tour est joué. Quand les premières images de la R25 sont diffusées, fin 1983, elles révèlent une grande voiture à deux corps et demi arborant un langage stylistique très moderne, personnel (même si on lui trouve des airs de grosse Fuego) et pourtant dénué de toute bizarrerie. Elle donne un sacré coup de vieux à ses rivales françaises, les Citroën CX et Peugeot 505, tout en en remontrant à l’Audi 100, alors considérée comme étant à la pointe de la modernité. La Renault est commercialisée au printemps 1984.

La R25 dans sa définition la plus simple en 1984, une TS. C’est aussi la plus aérodynamique de la gamme.
La R25 dans sa définition la plus simple en 1984, une TS. C’est aussi la plus aérodynamique de la gamme.

Initialement, en essence, trois blocs sont proposés. Un 2,0 l de 103 ch, un 2,2 l de 123 ch et un V6, le controversé PRV, en 2,7 l et 144 ch. Ce dernier s’associe uniquement à la finition la plus élevée, que l’on retrouve sur la Turbo DX animée par un diesel de 85 ch, et signalée extérieurement par quatre projecteurs, quand les autres se contentent de deux. Dans l’habitacle, passé le dessin surprenant et un peu agressif du tableau de bord, on se réjouit de l’espace disponible ainsi que de l’équipement riche. Chaîne hifi commandée au volant, ordinateur de bord, quatre vitres et sièges avant à réglages électriques, régulateur de vitesse… Le tout pour 130 000 F, soit 38 200 € actuels. Un prix compétitif compte tenu de la dotation d’origine, même si l’Audi 100 CD (138 ch) coûte un poil moins cher : 129 450 F. Oui, à l’époque, la marque aux anneaux n’était pas aussi premium que de nos jours…

Extérieurement, la V6 injection se distingue par ses quatre projecteurs, ses jantes en alliage et le monogramme apposé sur son montant arrière. Ici en 1984.
Extérieurement, la V6 injection se distingue par ses quatre projecteurs, ses jantes en alliage et le monogramme apposé sur son montant arrière. Ici en 1984.

À titre indicatif, la moins chère des R25, la TS, ne revient qu’à 77 500 F (23 000 €). C’est aussi la berline la plus aérodynamique du monde, avec un Cx à 0,28 ! Cela favorise le succès de la grande Renault, qui, malgré une finition légère et une fiabilité initialement précaire, s’accapare rapidement 5 % du marché français. Mais la V6 y participe assez peu, son moteur gourmand constituant un handicap. Heureusement, elle se voit épaulée par la V6 Turbo, présentée au salon de Paris 1984 et commercialisée en 1985. Outre sa suralimentation, cette version inaugure une version très améliorée du PRV : celui-ci adopte un vilebrequin à manetons décalés, qui le rend bien plus doux à l’usage. Malgré sa cylindrée réduite à 2,5 l, il développe 182 ch, de quoi lutter à armes égales avec les Audi 200 Turbo et Mercedes-Benz 300E de puissance similaire. Elle permet d’écouter les résultats du Top 50 à 223 km/h, mais son prix la réserve à une élite : 184 200 F (51 000 €). Cela dit, ces deux concurrentes teutonnes sont plus ruineuses encore : respectivement 208 150 F et 195 180 F, en dépit d’un équipement inférieur. Seule la française offre l’ABS de série.

La V6 Turbo en 1985. Notez les boucliers et rétroviseurs ton caisse ainsi que les jantes dont le motif évoque une turbine.
La V6 Turbo en 1985. Notez les boucliers et rétroviseurs ton caisse ainsi que les jantes dont le motif évoque une turbine.

Si ça ne suffit pas, une déclinaison Limousine, allongée de 30 cm et encore plus richement dotée, existe, à 228 200 F.

Pendant trois ans, les évolutions des R25 V6 seront limitées, l’atmo bénéficiant tout de même en 1987 d’un bloc porté à 2 849 cm3 (160 ch), et adoptant à son tour les manetons décalés. À noter que la boîte auto ne s’accouple qu’à l’ancien bloc.

En juin 1988, la Renault a droit à un restylage important, accompagnant la réélection de François Mitterrand. Le hasard fait bien les choses… L’avant se voit totalement redessiné dans un style arrondi, la poupe s’orne de feux agrandis, tandis que l’habitacle effectue un grand bond en avant par sa finition !

Vendue en 1985 et 1986, la Limousine n’aurait été produite qu’à 832 exemplaires, chez Heuliez.
Vendue en 1985 et 1986, la Limousine n’aurait été produite qu’à 832 exemplaires, chez Heuliez.

Celle-ci atteint même un niveau enviable en octobre quand est dévoilée l’étonnante déclinaison Baccara. Hyper luxueuse, celle-ci en met plein la vue : cuir de haute qualité, revêtement du tableau de bord plus chic, équipement hallucinant comprenant la clim auto et des sièges Ergomatic dotés d’une pléthore de coussins gonflables pour épouser parfaitement le dos. Étrangement, seul le V6 atmo s’associe à cette version. À l’été 1989, la France connaît un apogée moderne en fêtant le bicentenaire de sa révolution avec à sa tête un monarque élu, mais catalyseur oblige, la puissance du V6 atmo de la R25 chute à 153 ch (la boîte auto passe de 3 à 4 vitesses). Dans le même temps, ce bloc peut désormais s’associer à une appellation TX, dont la dotation, moins cossue, est calée sur celle de la GTX. En 1990, pour affronter les dangereuses Citroën XM et Peugeot 605, la R25 a droit à quelques améliorations. La V6 atmo peut se doter d’une direction Mecatronic à assistance asservie à la vitesse, montée en série sur la V6 Turbo qui passe à 205 ch et adopte enfin la finition Baccara. Le prix atteint alors un sommet : 261 000 F ! Dernière modernisation en 1991 avec l’apparition de l’amortissement piloté, en supplément. Les R25 terminent leur carrière début 1992 (avant Mitterrand donc), produites 780 976 exemplaires, chiffre qu’aucun haut de gamme français n’a ne serait-ce qu’approché depuis…

À partir de juin 1988, les feux arrière grandissent et gagnent une partie inférieure fumée.
À partir de juin 1988, les feux arrière grandissent et gagnent une partie inférieure fumée.

Combien ça coûte ?

Pas cher. Une V6 atmo moyenne mais fonctionnelle se déniche dès 2 000 €, un bel exemplaire d’environ 150 000 km atteignant 3 500 €. En ajoutant 1 500 €, on s’offre une Baccara présentant bien. Pour une V6 Turbo, il faudra dépenser 1 500 € supplémentaires à condition équivalente. Les autos vraiment impeccables, rarissimes car elles ne sont presque jamais restaurées, peuvent dépasser les 8 000 €. Quant à la limousine, quasi introuvable, elle est difficile à évaluer. Pour vous donner une idée, Artcurial a vendu pour 12 642 € en septembre dernier une V6 impeccable de 1re main achetée neuve par André Trigano, frère de Gilbert le célèbre fondateur du Club Med.

Lancée fin 1988, la Baccara n’existe initialement qu’avec le V6 atmosphérique.
Lancée fin 1988, la Baccara n’existe initialement qu’avec le V6 atmosphérique.

Quelle version choisir ?

Les phases II, mieux fabriquées, plus fiables et abouties, sont à privilégier. Une V6 160 ch de 1988 constitue un bon compromis. Si vous le pouvez, craquez pour le luxe d’une Baccara. Moins homogène, la V6 Turbo n’est pourtant pas moins agréable, au contraire !

La sellerie affriolante de la Baccara en 1988. Qui n’a pas envie de se vautrer dedans ?
La sellerie affriolante de la Baccara en 1988. Qui n’a pas envie de se vautrer dedans ?

Les versions collector

Ce sont d’abord les Limousine, de par leur exclusivité, ensuite les V6 Turbo Baccara. Évidemment, n’importe quelle R25 en parfait état et totalisant moins de 100 000 km sera aussi collector.

Même avec un turbo, le V6 PRV est robuste, bien plus que ses accessoires électriques, surtout l’alternateur.
Même avec un turbo, le V6 PRV est robuste, bien plus que ses accessoires électriques, surtout l’alternateur.

Que surveiller ?

Fondamentalement, les R25 V6 sont robustes mécaniquement, beaucoup ayant passé les 300 000 km sans panne majeure. Mais les phases I ont pâti d’une cascade de petits ennuis, surtout électriques et électroniques, alors que leur finition se signale par une certaine fragilité. Raymond Lévy, nommé PDG de Renault après l’assassinat de Georges Besse par les terroristes d’Action Directe, a même déclaré que la sienne allait au garage tous les mois !

Ça va nettement mieux sur les phases II, qui vieillissent plutôt bien, mais vérifiez bien que tous les accessoires soient fonctionnels, d’autant que la disponibilité de certaines pièces n’est pas fameuse. Enfin, même si elles étaient bien protégées pour leur époque, les 25 souffrent très logiquement de la rouille vu leur grand âge. À contrôler avec minutie.

La Baccara Turbo a droit à de belles jantes à fils BBS chaussées en 205/55 VR16.
La Baccara Turbo a droit à de belles jantes à fils BBS chaussées en 205/55 VR16.

Au volant

Étrangement, la R25 conserve une certaine prestance. Dans l’habitacle, on est surpris par l’espace disponible et surtout, le confort incroyable des sièges. Quel moelleux ! Dans cette V6 Turbo Baccara de 1991, la finition semble bien vieillir (le tableau se revêt d’un plastique imitant le cuir jusqu’aux coutures), et l’abondance de l’équipement fait douter de la notion de progrès. Cuir magnifique, hifi, clim auto, toutes commandes électriques, sac de rangement sous la tablette arrière…

On est assis un peu haut, mais la position de conduite reste bonne. À la mise en route, le moteur se signale par son silence, puis n’émet qu’un bruit de turbine feutré et raffiné. Souple, il manifeste un effet turbo assez marqué, qui lui confère un bien joli punch. On n’en abusera pas car le couple conséquent engendre des effets de couple notables dans le volant, plus que dans une R21 Turbo par exemple. Mais la direction, bien calibrée, permet un contrôle précis, l’agrément est bien là, d’autant que contrairement à la Safrane Biturbo, la boîte se révèle douce à manier.

Un look délicieusement eighties, très anguleux et constellé de boutons. Curieusement, l’ergonomie se révèle plutôt bonne.
Un look délicieusement eighties, très anguleux et constellé de boutons. Curieusement, l’ergonomie se révèle plutôt bonne.

Souple, la suspension préserve bien les vertèbres mais ne contient pas suffisamment les mouvements de caisse selon nos standards modernes. Et alors ? Menée du bout des doigts, cette R25 régale par son confort et son silence, tout en tenant très dignement la route (sans offrir la rigueur d’une CX Turbo 2 toutefois), alors que ses performances demeurent dangereuses pour le permis. Quant à la consommation, elle est directement fonction de la conduite, mais sur route, elle reste sous les 9 l/100 km. Un haut de gamme bien fait.

L’alternative newtimer*

Renault Vel Satis (2001-2009)

Ce n’est pas son étrangeté qui a coûté sa carrière à la Vel Satis, mais son manque de fiabilité. Ici, une restylée en 2005.
Ce n’est pas son étrangeté qui a coûté sa carrière à la Vel Satis, mais son manque de fiabilité. Ici, une restylée en 2005.

La Vel Satis, c’est le dernier haut de gamme Renault à part entière, les Latitude et Talisman qui lui ont succédé s’avérant bien moins cossues. En effet, sous un dessin tourmenté, la Vel Satis recèle un habitacle au confort exceptionnel : surélevé et vaste, il comporte des sièges amples tandis que l’insonorisation est remarquable. Malheureusement, le succès de cette grande Renault est compromis par une fiabilité désastreuse en début de carrière, surtout en diesel. Cela va mieux à partir de 2005, avec l’apparition de la phase II, corrigée, mais les ventes ne remonteront jamais.

En essence, les blocs sont fiables car éprouvés, le 2,0 l F4RT étant bien connu. Développant 170 ch, il est chapeauté par un excellent V6 3,5 l de 245 ch qui n’est autre que celui, dégonflé, de la Nissan 350Z. En diesel, le 2,0 l DCI apparu après le restylage tient le coup, mais on se méfiera comme de la peste du 2,2 l qui l’a précédé, et même du V6 3,0 l d’origine Isuzu. Seulement 62 201 Vel Satis ont été produites, un échec cuisant. À partir de 1 500 €.

La fameuse housse à vêtements en cuir de la R25 Baccara.
La fameuse housse à vêtements en cuir de la R25 Baccara.

Renault 25 V6 Turbo (1991), la fiche technique

  • Moteur : 6 cylindres en V, 2 458 cm3
  • Alimentation : injection
  • Suspension : bras superposés, ressorts hélicoïdaux, barre antiroulis (AV) ; bas transversaux, ressorts hélicoïdaux, barre antiroulis (AR)
  • Transmission : boîte 5 manuelle, traction
  • Puissance : 205 ch à 5 500 tr/mn
  • Couple : 290 Nm à 2 500 tr/mn
  • Poids : 1 410 kg
  • Vitesse maxi : 233 km/h (donnée constructeur)
  • 0 à 100 km/h : 8,5 s (donnée constructeur)

> Pour trouver des annonces de Renault 25, rendez-vous sur le site de La Centrale.

Le tableau de bord d’une V6 de 1986, qui conserve un aérateur central à ailettes verticales.
Le tableau de bord d’une V6 de 1986, qui conserve un aérateur central à ailettes verticales.

* Les newtimers sont des véhicules iconiques ou sportifs plus récents que les youngtimers, mais dont la valeur monte. Plus fiables et faciles à utiliser au quotidien, ils doivent leur essor à des caractéristiques techniques souvent disparues, comme de gros moteurs atmosphériques. Les BMW Z3 à 6 cylindres, Porsche Boxster 986 et autre Renault Clio V6 représentent bien cette nouvelle tendance.

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